Virginie Duroc-Danner : chocolatière 100% zen

Véritable ovni dans le monde impitoyable des Maîtres chocolatiers, cette artiste de talent peint elle-même les chocolats qu'elle créé. Une vie entre passion dévorante et grosse galères professionnelles. Rencontre avec une jeune maman pétillante, touchante et qui ne baisse jamais les bras.

Il y a dix ans à peine, Virgine Duroc-Danner se lance, sans "aucune légitimité", comme elle le dit elle-même, dans le monde très fermé des grands maîtres chocolatiers. Un métier d'excellence où l'on ne compte pas ses heures de travail. Pour compliquer les choses, et parce qu'elle est d'abord une artiste, elle décide de peindre elle-même les chocolats qu'elle fabrique dans son petit atelier des Hauts-de-Seine. Résultat : sa gamme de chocolats, baptisée VD-D du nom de ses initiales, rencontre un succès immédiat auprès des client(e)s et des médias. En 2003, France 3 lui consacre un reportage en forme de consécration. Mais, contre toute attente, on y découvre l'envers du décor. On voit Virginie qui se bat de toutes ses forces pour la survie de son entreprise, y mettant tout son temps et tout l'argent de son petit héritage. Car si le chocolat exige l'excellence, les marges de rentabilité sont faibles, presque inexistantes pour les petites entreprises comme la sienne. Depuis une décennie, la jeune femme affronte donc, courageusement, une situation financière intenable et paye cash ses erreurs, dont certaines auraient pu lui être fatales. mais elle ne renonce pas. Ses chocolats VD-D, aussi bon que beaux, représentaient la France au Sommet du G20 à Cannes, il y a quelques mois...

Comment est née cette aventure chocolatière ? 

Tout commence en 2001. Je faisais pas mal d'intérim à remplacer des gens qui ne fichaient pas grand chose ! Et je ne m'y retrouvais pas. Ce que j'adorais depuis toujours, c'était cuisiner. Cuisiner pour moi, pour les autres, pour faire plaisir. Juste après le Bac, j'avais refusé une formation en Cuisine pour je ne sais quelle raison stupide et j'en avais gardé de profonds regrets. Et puis, en mai 2001, le jour de la Fête des mères, je déjeune en famille  lorsque mon oncle me dit "Je te comprends pas. Quand on a la chance d'avoir une passion comme toi, on doit en faire son métier !" Et là, tout à coup, je me suis dit qu'il avait raison. Ç a a tout débloqué. j'ai alors voulu suivre une formation en cuisine aux USA et, histoire de ne pas être trop mégalo, je me suis fixée comme objectif de devenir Chef à la Maison Blanche, rien que ça ! C'était un rêve impossible mais j'y croyais. Mais en septembre, les attentats du World Trade Center ont remis en cause mon rêve. J'ai finalement suivi une formation en France et un an plus tard, je faisais un stage en chocolat chez Lenôtre. Et là, j'ai eu le coup de foudre absolu ! Je me suis dit, voilà, je suis faite pour ça : travailler le chocolat. En 2002, j'ai décidé de me lancer et de créer ma boite, VD-D.

Comment cette jolie idée de peindre le chocolat vous est-elle venue ?

J epeignais et j'ai voulu tester sur les chocolats de sidées que j'avais en tête. mes premiers essais, je les ai fait dans mon appart', en poussant les meubles. Et j'ai compris que peindre mes chocolats serait désormais ma signature. En devenant chocolatière, je suis aussi devenue artiste.

Quel est votre secret ?

Je ne sais pas ! Malgré les galères, les trahisons, parfois même les véritables mises à mort que j'ai subies sur le parcours, je suis toujours repartie au combat. À chaque fois, un sursaut d'énegie a relancé la machine, me redonnant l'espoir, repoussant les écheances de deux mois. Quand je dis que je donne tout pour y arriver, je le fais vraiment. J'ai vendu mes bijoux, j'ai vendu ma bagnole deux fois, j'ai dû licencier mes employés. Aujourd'hui, je n'ai plus rien à part mon entreprise, et surtout mon fils. Je vis avec 500 euros par mois et ça va !

C'est ce qu'on a envie de vous dire, vous semblez épanouie. Comment faites-vous ? 

Lorsque c'est dur tout le temps, arrive un moment où soit vous vous tapez la tête contre le mur, soit vous décidez que vous ne vous laisserez plus jamais abbattre. J'ai certes des coups au moral mais je fais en sorte qu'ils ne durent pas. Le secret pour tenir c'est d'être dans sa passion, de la vivre à fond.

Quelle est votre conception du bon chocolat ? 

Pour moi, le chocolat doit être bon et beau. les deux vont ensemble. Ma façon de travailler dépend de mon approche du chocolat qui est très "basique". Je veux d'abord de la super matière première et ensuite, je cherche un parfum à associer au chocolat. J'aime que les gens ressentent les parfums de manière primaire mais agréable. je cherche à déclencher le plaisir pur. Il faut que ce soit beau, bon, simple, que l'émotion soit spontanée. J'aime faire du chocolat-bonbon, du gourmand, des trucs qui rappellent l'enfance, les goûts oubliés.

Il y a quelques mois, lors du sommet du G8 puis du G20 à Cannes, vos chocolats V-DD ont été offerts, à la demande de l'Elysée, aux chefs d'État du monde entier. C'est une belle reconnaissance ?

Et une vraie fierté, puisqu'il y avait Baccarat Lancel.. et puis il y  avait moi ! (rires) Le fait d'être reconnue comme une vrai artisan, c'est ce qui me touche le plus. C'est pour ça que je me suis lancée il y a dix ans dans cette aventure. Et c'est aussi pour ça que je ne lacherais pas.

Source : Bonheur(s)